Les soignants en première ligne face au burn-out

« L’épuisement professionnel, mieux connu sous le terme de « burn-out », représente un réel problème de santé publique avec des conséquences lourdes pour la santé des travailleurs, des entreprises et de la société. Le secteur psycho-médico-social n’échappe pas au phénomène, ils ont été les premiers impactés.

C’est en 1969 que le mot « burn-out » a été utilisé pour la première fois. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, à l’époque, l’expression était réservée aux employés du domaine de la relation d’aide, très engagés émotionnellement dans leur travail, comme les infirmiers, les médecins, les travailleurs sociaux et les enseignants. Ensuite, dans le début des années 90, la fréquence des problèmes de santé psychologique au travail a augmenté de façon alarmante. De nos jours, ils constituent la première cause d’absence prolongée du travail, couramment appelé «  invalidité de longue durée ».

Difficile d’évaluer précisément le nombre de travailleurs concernés par cette maladie professionnelle mais si l’on se fie aux chiffres d’une étude relativement récente (2010) du Service Public Fédéral Emploi, 19.000 personnes souffrent de cette maladie en Belgique.

Le burn-out, c’est quoi exactement ?

Selon une définition communément admise, le burn-out est «  un état d’esprit négatif persistant lié au travail, chez des individus “normaux”, qui est caractérisé par de l’épuisement, un sentiment d’inefficacité, une démotivation et des comportements dysfonctionnels au travail. Cet état d’esprit n’est souvent pas remarqué par le travailleur pendant un long moment. Il résulte d’une différence entre les intentions et la réalité du travail. Souvent, les travailleurs entretiennent cet état d’esprit par des stratégies d’adaptation qui sont inefficaces ». (Schaufeli & Enzmann, 1998 )

Selon les psychologues et chercheurs Maslach et Leiter, lorsqu’une personne développe un burn-out, trois choses se produisent : cette personne commence à être épuisée de manière chronique, elle devient cynique et ensuite, elle se sent de plus en plus inefficace au travail.

Un mal-être qui se développe lentement et dure longtemps

Selon les résultats du SPF Emploi tirés d’une étude sur le burn-out au sein de la population active belge, dans 60% des cas, le burn-out est accompagné de troubles du sommeil. Les autres symptômes importants sont une diminution d’énergie (53%), des plaintes neurovégétatives et fonctionnelles (52%), une diminution de la motivation (48%), de l’asthénie (45,7%) et de la frustration (44,4%). Ces symptômes sont les plus fréquents que ce soit pour les cas de mal-être au travail ou pour les formes les plus avancées de burn-out.

Toujours selon cette étude, il est constaté que dans 30% des cas, les symptômes se manifestent depuis plus de 12 mois, ce qui confirme la vision du burn-out comme un processus qui se développe lentement et qui peut perdurer dans le temps. Étant donné que les personnes touchées par le burn-out accordent en général beaucoup d’importance à leur travail, dans les premiers mois, un certain déni des symptômes apparaît. Les signes précoces de burn-out sont donc difficilement diagnostiqués au cours des premiers mois.

Le burn-out, une maladie purement professionnelle

Par ailleurs, dans environ 95% des cas, les symptômes rapportés par les patients sont mis en lien avec le travail par le patient lui-même (87% des cas) ou par le médecin consulté (8%). Ce résultat confirme la perception du phénomène de burn-out comme restreint au domaine professionnel. Le burn-out n’est donc pas à confondre avec la dépression, qui s’étend plus largement dans la vie privée mais il convient aussi de différencier le burn-out de la fibromyalgie et de la fatigue chronique dont l’origine ne se trouve pas forcément dans le travail.

La contrainte qui est le plus souvent mise en lien avec le burn-out est la charge de travail (58% des cas). Les autres contraintes les plus fréquentes sont la pression temporelle (41%), les changements organisationnels (38%), les conflits au travail (37%) et les difficultés au niveau de la conciliation vie privée et vie professionnelle (30%).

Une atteinte à l’éthique professionnelle

Le burn-out n’a pas uniquement des conséquences néfastes sur le bien-être psychologique et physique de l’individu et sur son entourage. Dans les professions de contacts, les personnes avec lesquelles on entre en relation dans le cadre professionnel (clients et patients) peuvent également subir des conséquences négatives. Par ailleurs, il apparaît que le burn-out a un impact important sur la qualité des soins aux patients, sur la prévention des incidents cliniques et sur les erreurs médicales.

Le burn-out s’est davantage répandu ces dernières années et semble lié à l’évolution des conditions de travail. Nombreux sont les employeurs qui n’ont cessé d’accroître la flexibilité du travailleur dans le but d’en maintenir la rentabilité et surtout, de garantir à leur entreprise une certaine compétitivité. Cette évolution a un prix puisque manifestement, elle va à l’encontre du bien-être du travailleur et entraîne chez certains le désormais tristement célèbre burn-out…

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Article de Delphine Hotua paru le 15/08/2014 sur http://pro.guidesocial.be/actualites/bien-etre-au-travail-les-soignants-en-premiere-ligne-face-au-burnout.html

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Le burnout chez les psys, un grand tabou

Article paru le 25/08/14 sur le site de Guide Social: http://pro.guidesocial.be/actualites/le-burnout-chez-les-psys-un-grand-tabou.html

Psychological counselLes psychologues, comme le reste du secteur psycho-médico-social, sont particulièrement vulnérables au burnout. Parce qu’ils sont censés savoir comment gérer leurs émotions et celles des autres, les psys n’osent pas parler de ce mal-être. Et les moyens manquent pour les soutenir.

Eclairage avec Moira Mikolajczak, professeur de psychologie de la santé et des émotions à l’UCL.

Le burnout chez les psychologues présente-t-il des particularités ?

La définition du burn-out est la même pour toutes les professions. En revanche, le vécu du burnout par le psy est plus compliqué. Monsieur et Madame Tout le Monde ont le droit – ou en tout cas il est socialement acceptable – de souffrir du burnout. Mais on considère que le psy ne peut pas être touché par le burnout car il est sensé savoir comment résoudre les problèmes. De ce fait, le burnout est vécu comme un échec par les psychologues, qui ont l’impression qu’ils ne sont pas suffisamment bons dans leur profession. C’est un grand tabou dans la profession. Pourtant, le burnout est un signe qu’il réalise bien son métier, qu’il se donne à fond, qu’il est empathique.

Gérer les émotions

C’est tout le paradoxe… Le psychologue doit être empathique sans se laisser submerger par l’émotion, comment s’en sortir ?

En effet, le psy doit être capable de se laisser pénétrer par la souffrance pour être empathique mais il doit aussi se protéger partiellement. En fait, il doit gérer ses émotions. Pour cela, il lui faut des compétences émotionnelles. Tout le monde ne les a pas, ou pas au même degré. Une personne capable de gérer ses émotions peut aussi en cas d’événements de la vie difficiles perdre les pédales face à une charge émotionnelle trop forte.

Cela n’est pas sans impact sur les patients…

Le cadre de déontologie impose que quand un psychologue sent qu’il ne va pas bien, il doit arrêter. Mais il lui est difficile de reconnaître vis-à-vis de lui-même et vis-à-vis des autres son burnout… Il ne s’agit donc pas de malhonnêteté s’il continue à exercer.

Manque de soutien

Beaucoup de psychologues sont-ils touchés par le burnout ?

Il n’existe pas de chiffre à ma connaissance. Une chose est sûre : les chiffres seront sous-estimés vu la difficulté pour un psy de reconnaître qu’il est en burnout.

Le psy est souvent seul, surtout quand il est indépendant. Cela complique encore la situation ?

Le psychologue hospitalier n’est pas spécialement plus entouré que le psy indépendant. Quelques hôpitaux, organisent des réunions exclusivement entre psychologues mais la plupart du temps, le psychologue participe aux réunions avec tous les soignants. A nouveau, on compte sur lui pour apaiser les autres.

Quelles sont les pistes pour qu’ils s’en sortent ?

Ce qui peut les sortir du burnout, ce sont des espace-temps comme un congé parental. Aussi, les psychologues pourraient bénéficier de formations continues comme les médecins. Ces formations pourraient pourtant être l’occasion de partager leurs expériences et de délier les langues. Certaines associations de psys m’ont déjà contactée, ainsi que d’autres chercheurs spécialisés en compétences émotionnelles, pour donner des conférences sur le sujet. Seul problème : les formateurs ont un prix. Et si les entreprises sont capables de s’en payer, le secteur social lui manque d’argent.

Manon Legrand

Le stress prolongé laisse des marques durables dans le cerveau | PsychoMédia

Le stress prolongé laisse des marques durables dans le cerveau | PsychoMédia.

Suite à une exposition prolongée au stress, des modifications cérébrales demeurent présentes plusieurs mois plus tard, selon une étude néerlandaise menée avec des soldats de retour d’Afghanistan, publiée dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS).

Guido van Wingen et ses collègues de l’université de Radboud (Amsterdam) et du Centre de recherche militaire d’Utrecht ont mené cette étude avec 33 soldats déployés en Afghanistan pour une mission de quatre mois, qui n’ont pas été blessés mais ont été soumis au stress prolongé des zones de combat, et 26 soldats qui n’ont pas été exposés à ce stress.

Des images cérébrales ont été prises avant qu’ils ne soient déployés, 6 semaines après leur retour et un an et demi plus tard.

Le stress du combat réduisait l’activité et l’intégrité du mésencéphale, ce qui était lié, selon des tests neuropsychologiques, à une capacité d’attention et de concentration réduite lors de tâches cognitives complexes. Ces changements étaient normalisés après un an et demi ainsi que la capacité de maintenir l’attention. Cependant, une réduction de la connectivité fonctionnelle entre le mésencéphale et le cortex préfrontal (circuit mésofrontal) était toujours présente.

De quelle façon ces perturbations peuvent affecter les gens à long terme n’est pas connu, indiquent les chercheurs. Il est possible, disent-ils, que ces changement les rendent plus vulnérables aux stress futurs, ce qui pourrait affecter leur vie sociale et leur employabilité. Des études sur des animaux ont montré que des déficits des fonctions exécutives pouvaient résulter d’une altération de ce circuit. Les fonctions exécutives concernent la coordination de l’ensemble des fonctions cognitives, par exemple l’organisation des actions vers l’atteinte de buts.

“Ces résultats suggèrent que le cerveau humain peut largement récupérer des effets délétères du stress, supportant l’idée d’une plasticité cérébrale adaptative au stress prolongé”, note le chercheur. “Cependant, ils montrent aussi des changements durables dans le circuit mésofrontal qui pourraient accroître la vulnérabilité à de nouveaux stress et conduire à des déficits cognitifs prolongés.”

Plus du quart des soldats qui reviennent d’Irak et d’Afghanistan ont des difficultés de fonctionnement social et opérationnel, notent les chercheurs.

Êtes-vous proactif pour prévenir le stress et atteindre vos objectifs? FAITES LE TEST

Psychomédiaavec sources: PNAS, US News (HealthDay)